Troubles du comportement alimentaire
Laure Clevy
Le poids d'équilibre
Cette notion de poids d'équilibre vous est peut-être étrangère. Laissez-moi vous expliquer brièvement -
c'est le poids que vous atteindrez avec un comportement alimentaire qui suit vos besoins physiologiques, c'est à dire adapté à vos besoins. Ce poids d'équilibre dépend de différents paramètres:
- la génétique (il existe des gènes familiaux qui favorisent le surpoids)
- le mode de vie
- les régimes successifs (plus il y a eu de régimes et donc d'oscillation de poids, plus le poids d'équilibre est élevé)
Gardons en tête que ce poids d'équilibre n'est pas précis, il varie dans une fourchette de 5-6 kilos.
Donc en bref, ce poids on ne le choisit pas. Libre à vous de vouloir peser 5 kg de moins que votre taille ou de rentrer dans votre jean taille 38 que vous portiez à 30 ans, mais sachez que vous ne pourrez atteindre votre objectif qu'au prix d'efforts intenses: lutter contre vos envies de manger, vous interdire certains aliments, ne pas manger comme vos amis ou votre famille aux repas, beaucoup penser à la nourriture, vous peser trop souvent et la peur au ventre, finalement ne plus prendre de plaisir lorsque vous mangerez votre dessert favori.
Le contrôle de l'alimentation
Contrôler son alimentation c'est prendre de nombreux risques: s'éloigner de ses proches (parce qu'on refuse des invitations de peur de ne pas pouvoir choisir son repas), accumuler les frustrations et changer de personnalité - s'énerver pour un rien, avoir des difficultés de concentration - se jeter sur des aliments 'tabous' de temps en temps parce qu'on n'en peut plus de se priver, donc reprendre du poids et se trouver nul, se dévaloriser, culpabiliser d'être incapable de tenir ses résolutions...
Le tableau n'est pas réjouissant et malheureusement il est représentatif de ce que vivent de nombreuses personnes.
Cette lutte contre notre régulation naturelle peut être vécue comme un challenge et une victoire s'il y a perte de poids. On se sent alors épanoui, fier et satisfait. Mais cela ne dure pas.
Savoir ce qui est bon pour notre corps, chercher à lui apporter tous les nutriments nécessaires, c'est plutôt faire preuve de bon sens, mais il y a une limite.
Quand l'alimentation tourne à l'obsession, qu'on se pèse tous les matins, qu'on compte les calories de nos menus et que notre entourage nous fait des remarques, c'est qu'on est dans le contrôle sévère.
Le trouble du comportement alimentaire
Pourquoi un trouble ? Parce que les sensations alimentaires ne sont pas respectées. La personne se convainc qu'elle n'a pas faim, se force à arrêter de manger alors qu'elle a encore faim, mange sans faim des légumes crus ou bâtonnets de surimi pour 'se remplir'... Alors qu'elle criait victoire au bout de quelques semaines, heureuse d'avoir perdu 6 kg, elle a désormais continuellement peur - d'avoir faim, de manquer d'aliments 'sains', de craquer, d'être frustrée... Et le risque c'est alors de manger pour calmer ses émotions. On va manger des aliments 'non grossissants' comme des fruits, mais plus le temps va passer, plus on va être au contact de gens qui mangent normalement et plus le contrôle va être difficile.
Au bout du compte, les sensations alimentaires ne sont plus perçues ou se confondent. On est incapable de savoir si on a faim ou si on a envie d'un aliment. La moindre petite émotion nous submerge - un peu d'ennui ou de fatigue, et on a une fringale de chocolat. Les pertes de contrôle sont fréquentes, on mange en cachette, on mange trop et on le sait mais on ne sait pas quoi faire.